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Chapitre 8 "Compassion"

Ici Pierre vit dans son corps la voie de la compassion qui ne peut être vécue autrement. Il ne saurait s’agir d’un processus ni d’un concept intellectuel. Nous ne confondrons pas compassion et empathie, il s’agit d’une relation aux autres d’un autre niveau, sur un pied d’égalité. Il n'est pas question ici d’avoir de la sympathie ou un élan de cœur pour quelqu’un qui souffre, la compassion a peu à voir avec la pitié.

On peut parler durant des heures de la compassion comme sujet philosophique sans jamais la ressentir. Le seul moyen de la contacter vraiment, c’est de la vivre avec et dans sa propre matière. La compassion vraie est le résultat de la présence en nous de la part la plus élevée de nôtre être qui est en lien direct avec cette même part de tous les autres êtres sans exception. Quand la compassion est là, il n’y a pas de notion d’ami, d’ennemi, de sympathie ou d’antipathie, tous les êtres sont embrassés dans le courant d’amour inconditionnel que l’on partage à égalité avec eux. Il ne saurait y avoir de notion de supériorité d’aucune forme sur un quelconque autre être vivant quand la compassion se manifeste chez un individu. La compassion est le tremplin de l’essor spirituel. C’est elle qui ouvre toute les portes sur le chemin par sa seule manifestation, sans le recours à quelque rituel ni le besoin de possessions. 

Pierre accède à la compassion par le partage fusionnel d’expérience avec ceux qu’il a côtoyés dans cette vie. Il expérimente ce stade durant lequel il nous est donné de ressentir tout le mal que nous avons pu faire aux autres êtres. D’ordinaire, cette expérience se déroule durant la traversée du Bardo, entre deux incarnations. Du fait de son travail spirituel, comme à la plupart des disciples, il est donné à Pierre de traverser les étapes du Bardo de son vivant, lors de ses exercices de méditation ou plutôt en état de conscience modifiée. Le défunt erre souvent longtemps dans cette partie du Bardo qui s’apparente au purgatoire des chrétiens jusqu’à ce qu’il prenne conscience de ce qu’est la compassion et qu’il s'identifie à elle.

La compassion change le regard de Pierre sur ses parents, amis, collègues de travail et il perçoit tous les efforts qu’ils ont faits pour lui. Il découvre la reconnaissance et la gratitude. Il lui reste une part importante d’ego car il est envahi par l’idée de réparer ses bêtises, de consoler les souffrances qu’il leur a fait vivre. Il s’agit là de relents de sa toute-puissance. Il entretien encore l’illusion de la responsabilité de ses actes, comme s’il avait librement influé sur le cours de l’histoire. 

A son arrivée à Leh, Pierre trouve rapidement les visages familiers, il s’agit d’un clin d’œil à la suite. La roman est émaillé de ce type d’informations, plus par jeu de ma part, pour donner une indication que par nécessité de donner un sens particulier à ces informations. Le salut se dit : "Namasté", c'est le mot de la compassion, celui de la reconnaissance de ce qui lie définitivement à tous les êtres vivants. Il indique la racine de l’être, ce qui nous est commun.

Le petit Rinpoché de Spituk ne se nomme pas Radula, il existe bien. C’est un Tulku qui se réincarne ici depuis le onzième siècle. Son véritable nom est Bakula Rinpoché. C’était encore un enfant, quand je l’ai vu qui courait sur les toits des temples et jouait à cache-cache avec son précepteur entre deux enseignements. La vie d’enfant dans ces temples n’est pas austère, il respire la joie et la bonne humeur. Il sait son rang mais ne se prend pas la tête avec, son ego n’a pas eu le temps d’enfler avant que ne débute ou ne reprenne un sérieux travail spirituel. Les retrouvailles d’un monastère avec son Tulku constituent un grand moment dans la vie de la communauté.

Il y a souvent plusieurs prétendants, ils sont sincères, mais un seul est l’émanation complète et véritable du Tulku. Il ne faut pas croire qu’il y ait une recherche avide pour les familles ni de manipulation lorsque plusieurs prétendants se présentent. Il y a un fait qui n’est plus enseigné dans la mystique chrétienne, c’est la notion d’émanation qui est pourtant connue depuis des siècles. De quoi s’agit-il ? Au risque de choquer, en voici l’explication : un même esprit qui porte une mission importante peut disposer de plusieurs possibilités d’incarnation. Il « partage » avec d’autres plusieurs corps physiques qui se développent en parallèle dans plusieurs familles. L’esprit visite et « co-anime » le développement de ses différentes émanations. Les védantistes pensent qu’un même esprit peut animer jusqu’à sept émanations humaines simultanément disséminées dans le monde, incarnées ou non. Il anime aussi des animaux, des plantes, des minéraux, en grand nombre. Ceci est une autre histoire très loin de nos champs de conscience actuelle qui peuvent être heurtées par cette information. Le végétarisme indou tire son origine des liens supposés entre chaque humain et de nombreux animaux dont il ressent les souffrances s'ils sont maltraités ou tués.

Lors de l’épreuve de reconnaissance, l’esprit du Tulku choisit celui qu’il pense le plus apte à assurer son incarnation. Celui qui est choisi a alors la révélation fulgurante qui lui permet de reconnaître ses affaires. Les autres ne sont pas abandonnés, le nouveau Rinpoché les soutiendra tout au long de leur vie et il prendra soin d’eux. Il est aussi réservé un sort favorable à celui qui a cédé son corps au Rinpoché. Ici les corps physiques sont vus comme des véhicules qui sont interchangeables pendant les premières années de la vie moyennant certaines conditions.

C’est donc dans le chapitre « compassion » que naturellement est évoquée la roue de la vie. C’est ici aussi qu’est décrit le contact front contre front qui est le plus puissant moyen de transmission du maître à son disciple, sans geste, tête contre tête, souvent le maître parle mais le disciple n’entend pas ou ne comprend rien à ce qui lui est dit. Le maître s’incline vers le disciple et lui ouvre l’accès à son propre maître intérieur en rassurant ses cellules et en leur montrant ce qu’est la présence de l’esprit. Souvent le disciple n’est pas prêt à recevoir en conscience et ne perçoit rien. Cela n’enlève rien à ce qui se passe, quand il sera prêt, le disciple se rappellera de cet instant et du travail qu’a opéré le maître sur lui. Ce contact entre Pierre et le petit Rinpotché a confirmé les intuitions de Thundup qui à partir de là va donner de nombreux enseignement à Pierre pour le réparer à se mettre en chemin.

C’est dans ce chapitre que Pierre prend conscience que le gardien n’est en fait pas neutre, qu’il exhausse ses demandes. Ici, le gardien symbolise l’esprit. Ce qui se passe montre la relation entre l’ego et l’esprit. L’ego demande, l’esprit apporte les éléments de la satisfaction de cette demande. Dans la vie courante, nous n’attendons pas la satisfaction de la première demande que cent autres ont déjà fusé dans toutes les directions, neutralisant l’action pour nous apporter satisfaction de la première demande que nous avons oubliée sitôt qu'elle a été formulée. C’est ici qu’il a reconstitué l’histoire de l’accident, il n’est pas encore assez avancé pour comprendre les motivations de ceux qui sont venus le récupérer.



19/09/2015
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