albarede

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Chapitre 11 "Passage"

Le titre de ce chapitre comme celui du suivant est une allusion directe aux pratiques des initiations traditionnelles en trois degrés. Il s’agit de l’accès au second degré. Le premier degré a enseigné à l’apprenti à se tenir droit, à trouver la verticale (symbolisée par le fil à plomb). Le fait d’avoir été initié entretien l’illusion chez certains d’avoir atteint un but de faire partie d’une classe d’humains au-dessus des autres. Le second degré est celui de la désillusion, on y apprend notamment la stagnation, la prise de conscience des états intermédiaires. Alors qu’on se croyait à mi-parcours, on apprend que ce qu’on prenait pour le but n’est que le début du commencement du travail à faire pour participer utilement à l’œuvre. 

Pierre, confronté à la stagnation perd espoir, mais son maître intérieur est là et veille comme c’est le cas pour chacun de nous. La petite lampe ne s’éteint pas. Pierre relativise la notion d’échec liée aux sensations. Il différentie ce qui est plaisant, déplaisant ou neutre et trouve son refuge hors du monde des sensations. Il a découvert que se fier à ses sensations n’est que s’abandonner à son histoire, à la mémoire de ses cellules qui réagissent par analogie avec ce qu’elles ont vécu. Nos cellules nous proposent une somme de réflexes Pavloviens qui visent à nous écarter de ce qui est déplaisant pour nous conduire vers ce qui leur est plaisant. Ces deux voies sont des impasses qui nous conduisent à la périphérie de notre être.

Pierre prend conscience de l’incohérence des constructions humaines, de l’illusion et de la vacuité de la structure de nos sociétés et des buts de nos vies même. C’est là que lui revient en mémoire la vie de Milarepa lorsqu’il comprend l’indigence de ses motivations initiales dans sa volonté de nuire et de venger sa mère. Marpa son maître a un comportement totalement incohérent avec lui, lui faisant démolir ce qu’il venait de lui ordonner de construire, l’insultant. Un jour Milarepa ne cherche plus à rendre le monde cohérent, ne cherche plus du sens dans ce qui lui arrive, il abandonne son mental et sa volonté de comprendre et dominer. Alors seulement il parvient sur le seuil de l’illumination permanente et le franchit.

Dans ce chapitre Pierre sait qu’ils sont onze « prisonniers » dont un a été libéré mais n’est pas parti. Tant qu’il cherche à expliquer cette situation, il perd son temps. Ce qui est important c’est de vivre avec sincérité dans le présent et non de tout expliquer. Encore un pas franchi par Pierre, cesser de vouloir tout comprendre, arrêter ainsi le moteur de la domination.

Les exercices que pratique Pierre l’ont conduit à réaliser le bien précieux qu’est d’être en vie. Vie à laquelle même dans les pires conditions on s’accroche. Il est reconnaissant à ses cellules pour leur solidarité qui lui permet de poursuivre son existence, à ses parents de l’avoir conçu et de lui avoir permis de naître. Ainsi il fait la paix avec son histoire de vie, avec son hérédité. L’évidence du bonheur lui paraît, il accepte le flux d’amour qui attend chaque être à la seule condition qu’il se laisse submerger. Le katha (écharpe que le disciple échange avec le maître) qui lui est remis représente ce don d’amour et valide la possibilité de l’étape suivante.   



07/10/2015
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